mardi 9 août 2011

Emeutes au Royaume Uni août 2011 et Harry Brown


Images de Londres 7 août 2011 - Photo Leon Neal / AFP
Bonjour à tous.

Un petit papier très court pour mettre en relation actualité et cinéma.
En janvier 2011 sortait le film Harry Brown. J'y consacrai un article pour comparer la représentation de la violence urbaine montrée dans ce film avec celle présentée dans les médias et les films français.

Ce qui saute aux yeux est l'extrême violence qui est montrée dans les images télévisées anglaises qui correspond à celle mise en scène par le réalisateur. De même, le déclenchement de l'émeute est dans le film comme à Londres cet été dû à une intervention policière gênant les activités illégales de certains jeunes ou moins jeunes.

La réaction policière dans le film apparaît comme disproportionnée. A y regarder de plus près, l'engagement de David Cameron de passer de 6000 hommes à 16000 dans les zones d'émeute n'est pas une mince réaction!

Contrairement aux émeutes de 2005 ayant eu lieu en France, aucune information ne remonte des médias anglais pour expliquer cette violence comme étant due à des problèmes d'intégrations des populations immigrées ou à des différenciations ethniques que subirait la société anglaise. Dans un pays qui a longtemps vanté une gestion communautariste des différents groupes de sa population, il n'y a rien d'étonnant. En revanche, on peut s'étonner que les journalistes français ne s'interrogent pas davantage sur ce point précis. Pour mémoire, les casseurs cagoulés de 2005 étaient souvent assimilés à des jeunes issus de l'immigration et en échec d'insertion dans la société, pour ne pas dire d'intégration, alors mêmes que ces jeunes cagoulés pouvaient être de la 3ème voire 4ème génération post-immigration.
Est-ce à dire que les cagoules anglaises sont moins une preuve de marginalisation de la patrie britannique que ne pouvaient l'être la cagoule française de la patrie française? On peut aussi y voir un suivisme des sources britanniques sans analyse. On peut encore croire que les journalistes se rendent compte que les analyses de 2005 sont invalidées par les événements de ce mois d'août dans un pays ayant autrement géré ses populations immigrées ou issues de l'immigration.

On peut enfin et surtout se rendre compte que comme dans Harry Brown, l'explication de ces émeutes est avant tout sociale, expliquée par la crise financière et économique, et politique, marquée par l'incapacité des gouvernements en général et de celui britannique en particulier, à gérer socialement la crise.
Dans Harry Brown, le héros, issu du quartier enflammé réglait lui-même les problèmes des caïds, provoquant le mépris de nombreux critiques de cinéma. Or le film ne traduisait qu'une réalité du terrain.

Une banlieue en flamme, des policiers nombreux 
mais impuissants, et un sauveur illusoire devant:
une des affiches de Harry Brown
Quand l'Etat est défaillant, quand la Loi démocratique ne défend plus les plus faibles, l'Ordre ne se rétablit que de l'intérieur. Est-ce Bien? Du point de vue de notre société démocratique, certainement pas. Pour un réalisateur, cela permet une dramaturgie évidente. Et pour les spectateurs, ce personnage devient facilement un "Robin des Bois". A ceci près que, contrairement à ce que les plus farouches critiques dénonçaient du film, le calme obtenu par Harry Brown n'est qu'un calme relatif. Le spectateur sait très bien que rien n'est vraiment réglé, sinon un ordre temporaire, une quiétude momentanée jusqu'à ce que de nouveaux caïds ne prennent le pouvoir.

Harry Brown n'est pas un film prémonitoire. Il ne se nourrit que de ce qui gronde déjà et que les médias ne perçoivent pas. Une tension sous-jacente prête à exploser. Le film localisait son émeute urbaine dans une banlieue populaire. La réalité a dépassé ce cadre, allant d'abord en centre ville de Londres, puis se propageant dans d'autres villes en rien concernées par l'élément déclencheur des violences urbaines.

En ceci, il faudrait toujours voir un film sur l'analyse d'un fait sociétal non comme une prévision à la Cassandre, mais bien comme un symptôme. Et ne pas se contenter d'une analyse morale externe au film sans en comprendre le sens réel. Cela aurait par exemple évité à certains journalistes ou intellectuels de traiter L'inspecteur Harry de film fasciste!

A bientôt

Lionel Lacour

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